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Petites histoires de chasseurs
 

Retour : 07- Recherche sur le terrain - Petites histoires de chasseurs

Dans le nord Franche-Comté

Par Roland F5ZV

Trois histoires de chasses à la SRS-C34 de Payerne

Le 29 avril 2012, Felon (Territoire de Belfort)

Voilà trois ans qu'une RS n'était pas retombée dans le Territoire de Belfort, l'oubli est réparé.
Une surveillance attentive du windgram prévisionnelle me laissait espérer un point de chute dans un rayon de mois de 50km. Programme de décodage maison en route, je pars en espérant pouvoir me trouver à
proximité du point de chute calculé et, avec un gros coup de chance, la voir tomber.
Elle est tombée à 1 km de moi à la vitesse de 12m/s, c'est à dire qu'entre sa sortie du nuage et l'impact il ne s'est guère écoulé plus d'une demi-minute.
Fin de la recherche très facile, la C34 a choisi une pâture au milieu des bois. Elle gît bien à plat, couchée sur son antenne.
Je profite de l'occasion pour faire quelques essais de portée en harmonique 2 : pas plus de 25m. Nouvel essai en l'accrochant à 1,5m du sol : plus de 130m. C'est bon à savoir.
Voilà une demi-heure que je tourne autour d'elle, il est temps de rentrer. Un appel rapide sur 145.550 : réponse de RAymond F5JAE qui tourne dans le coin : je lui laisse tout le temps qu'il veut pour la trouver en gonio pure, une demi-heure plus tard il est là et la trouve facilement. Nous profitons de l'occasion pour discuter technique de recherche et programmation quand, quelques dizaines de minutes plus
tard, une voiture immatriculée en Allemagne s'arrête près de nous : l'Ours !
L'Ours est un OM sympathique et très amical, même si ses méthodes de chasses ne sont pas celles que nous pratiquons en France. Nous discutons pendant plus de deux heures et lui offrons la C34. On ne pouvait pas lui faire plus beau cadeau : cela fait longtemps qu'il la guettait, c'est sa première C34. Nous en retrouverons d'autres. Peut-être celle de 00Z ou celle de demain 12Z ?


Le 30 avril 2012, Trévenans (Territoire de Belfort)

Elle a récidivée. Douze heures après l'atterrissage de sa soeur de 12Z, la C34 de Payerne de 00Z a choisi le plus petit département de la France rurale pour nicher. Elles ont du mérite. Et c'est vraiment sa soeur car la première avait visé une clairière au milieu de la forêt pour nous faciliter la tâche, celle-ci a réussi à se poser juste entre l'autoroute, deux étangs, le canal et une petite zone industrielle.
Beaucoup de bonne volonté, certes, mais pas beaucoup de bon-sens et d'expérience car l'étourdie a plongé en plein milieu d'une mare nauséabonde, un bac de décantation pour l'eau de ruissellement de l'autoroute ?
Si vous étiez passé à Trévenans, entre Belfort et Montbéliard à 3h30 du mat' vous auriez pu voir ZV (sans lampe pour ne pas attirer l'attention), glisser sous la clôture tout son matériel de récupération, ramper sous une porte grillagée de deux mètres de haut, déballer un mât télescopique de 8m, y rabouter trois bâtons de ski et repêcher le boîtier et le gros paquet de latex emmêlé dans le parachute comme à son habitude.
Retour à 4h30, il ne me reste plus qu'à rincer le tout car ça sent un peu la marée. J'ai même ramené sur la rive une housse de parapluie accrochée à la ficelle.
Pas de photos pour cause de discrétion mais un bout de Google-map pour se faire une idée.

Le 30 avril 2012, à l'ouest d'Héricourt (Haute-Saône)

Et de trois. La troisième C34 de Payerne à profiter du jet-stream pour faire un tour au nord est retombée tranquillement un peu à l'ouest d'Héricourt, exactement en 47.60897 / 6.67877 dans le département 70.
Un décodage sans problème, la prévision du point de chute a bien fonctionné avec toutefois un épisode intéressant. En observant les variations de la vitesse de chute j'ai constaté que celle-ci était d'abord relativement faible laissant espérer que le parachute fonctionnait. Tout alla bien pendant un bon quart d'heure. Puis, très rapidement, la vitesse a commencé à augmenter et a finalement pris une valeur habituelle (et même un peu plus grande), c'est à dire celle qui correspond à un parachute en torche. J'imagine bien que le parachute était d'abord complètement déployé puis qu'il s'est entortillé avec les restes d'enveloppe. Cela n'explique pas pourquoi la vitesse d'impact est nettement supérieure à ce que l'on constate d'habitude. Mais j'aurai l'explication tout à l'heure...
Chute rapide, signal perdu à 955m mais le point de chute décodé est certainement précis car les vents à basse altitude sont très faibles.
Un coup d'oeil sur la carte avant de partir pour repérer la zone et je range le GPS. Le reste doit se faire en gonio pure.
Sur la voie rapide Héricourt-Lure, je retrouve le signal pendant quelques kilomètres. Comme il est très fort pendant quelques instants (et que je sais que le point de chute n'est pas très loin de cette route pour l'avoir décodé), je n'ai plus qu'à prendre la prochaine sortie. Une petite route me ramène en arrière, un chemin forestier barré par une barrière. Le temps de faire sauter le cadenas d'un coup de burin... Mais non Philippe F4GRT, je plai-san-te ! D'abord il n'y avait pas de cadenas et de toutes façon le chemin était impraticable pour ma belle voiture presque neuve. Le signal n'est pas très fort mais il est droit devant. Cinq minutes plus tard j'ai les bottes aux pieds et le gilet fluo sur le dos. J'emporte aussi le fagot de cannes et ba^tons de ski, le pocket 144, la 5 éléments de Wolfgang et tout ce qu'il faut pour faire de la gonio.
Au bout d'un bon kilomètre le signal est très fort, c'est le moment de passer sur l'harmonique 2, donc 807MHz. Tiens déjà deux barres au S-mètre, direction très nette (alors que sur 403 même décalé je ne pouvais trouver une direction) je lève les yeux et, entre les jeunes feuilles des hêtres, je distingue à cinquante mètres une grosse boîte blanche sur la pente en face. Ah mais oui, on est lundi, jour de mesure d'ozone !
Je n'aurai pas besoin de tout mon attirail, même pour récupérer le parachute et les restes de l'enveloppe. Ah tiens, voilà pourquoi la vitesse de chute était plus grande que d'habitude : il ne reste que le manchon de gonflage. On peut en conclure que la masse de l'enveloppe est plutôt un frein qu'un accélérateur, elle donne un coup de main au parachute, pour s'excuser un peu de l'étouffer dans son étreinte...
Encore une remarque : la courbe de vitesse de montée montre très bien que le ballon a failli plafonner à 36340m. Le ballon ne se décidait pas à éclater. Est-ce pour cela qu'il ne reste presque rien de l'enveloppe ? Le latex aurait-il eu le temps de se distendre gentiment et de terminer sa carrière en miettes éparses ?
Retour au véhicule avec tout le bazar dans les bras, par monts et par vaux dans la belle forêt haut-saônoise. J'aurai encore appris quelque chose aujourd'hui.